L’Observatoire Marocain de la TPME vient de publier la première édition de son rapport annuel. Il a pour objectif essentiel d’éclairer la réflexion sur les enjeux liés au tissu productif national, en, mettant à la disposition des acteurs publics et privés une série d’indicateurs clés de la démographie et de la santé économique et financière des entreprises, en particulier des TPME.  Selon l’Observatoire, ce travail est le résultat d’un long processus de collaboration engagé depuis 2014 avec plusieurs partenaires et qui s’est accéléré avec la signature, en 2017, de conventions d’échange de données avec Bank Al-Maghrib, la DGI, la CNSS et l’OMPIC. Pour l’élaboration de ce premier rapport, la priorité a été donnée au traitement des informations relatives aux entreprises Personnes morales assujetties à l’IS, dont le nombre s’élève, en 2018, à 249.131, avant d’étendre ce travail, par la suite, aux entreprises Personnes physiques.

Principaux résultats du rapport

Le rapport montre que le tissu des entreprises Personnes Morales actives est très fragmenté, 99.4% d’entre elles étant des TPME, dont plus de 85.8% sont des microentreprises avec un chiffre d’affaires n’excédant pas 3 millions de dirhams. « La part de cette dernière catégorie d’entreprises dans le tissu productif national serait encore plus importante si l’on devait y intégrer les entreprises Personnes Physiques déclarées à la DGI et les autres unités de production de l’économie », est-il précisé.

Sur la base des données arrêtées à fin 2018, il ressort que les TPME ne réalisent que 36.7% du total du chiffre d’affaires, dont 27.3% à l’export, et 36.6% de celui de la valeur ajoutée de la population d’entreprises étudiées (excluant celles à caractère financier), alors qu’elles sont les principales pourvoyeuses de l’emploi, puisqu’elles ont occupé près de 73% de l’effectif déclaré à la CNSS.  Globalement, 78,6% du total des entreprises emploient entre 1 et 10 personnes, une proportion en quasi-stabilité par rapport à 2017. Cette part est de 15,3% pour les entreprises employant entre 11 et 50 personnes, et 0,7% pour celles employant plus de 500 personnes.

Par ailleurs, la plupart des TPME opèrent dans des activités peu consommatrices de ressources financières. Ainsi, plus de 54% de celles-ci étaient concentrées, en 2018, dans les secteurs « Commerce ; réparation d’automobiles et de motocycles » générant 48% de la valeur ajoutée respective de ce secteur. Suivent la « construction » et les « activités spécialisées, scientifiques et techniques » avec des parts respectives de 22% et 10%. S’agissant de l’« industrie manufacturière », cette proportion est limitée à 5,4%, au même niveau qu’en 2017

La création d’entreprise s’accélère

Si la création d’entreprise s’accélère, de nombreux obstacles se présentent sur le chemin de l’entrepreneur dans les années qui suivent.

L’année 2018 a été en effet marquée par une dynamique en termes de création d’entreprises et ce, avec plus de 98.000 entreprises nouvellement créées dont plus de 46.000 personnes morales (PM). Ces dernières ont vu leur nombre augmenter de 13,2% contre seulement 1,8% en 2017. Ce dynamisme pourrait s’expliquer notamment par certaines exonérations d’impôts et la simplification des démarches administratives.

Une part importante des nouvelles créations d’entreprises PM en 2018, soit 35,8% du total contre 34,9% en 2017, a été enregistrée au niveau de la région de Casablanca-Settat. Elle est suivie des régions de Rabat-Salé-Kenitra et Tanger-Tétouan-Al Hoceima, respectivement, avec des parts de 14% et 11,6%

Passer le cap des 5 ans, un vrai challenge pour les TPME

L’examen de la situation financière des TPME fait ressortir plusieurs fragilités, particulièrement au niveau des entreprises de petite taille, en termes de structure bilantielle, de productivité et de rentabilité, qui les pousseraient à sortir du marché dans des délais assez courts. En effet, les données de l’OMPIC montrent, qu’entre 2016 et 2018, les entreprises radiées avant d’arriver au terme de 5 ans d’existence représentent, en moyenne annuelle, une part de plus de 50% du total. Ces proportions sont de 31% et 15% respectivement pour les entreprises ayant entre 5 à 10 ans et entre 10 à 20 ans d’existence. En revanche, la part des entreprises radiées dont l’âge dépasse 20 ans est limitée à 3,4%

L’année 2018 a connu une baisse du nombre de radiations d’entreprises PM de 1,8% à 5.587, contre une hausse de 10% en 2017. La ventilation régionale de ces radiations révèle la prédominance de la région de Casablanca-Settat qui recense à elle seule 35% du total, ces radiations ayant baissé de 6% contre 4,4%. La seconde place est occupée par la région de Rabat-Salé-Kénitra avec une part de 16%, en baisse de 0,7%. Pour ce qui est de la région de Marrakech-Safi, cette proportion est de 14,2% contre 13,5%.

A souligner que les radiations sont considérées à la suite de la décision de clôture de liquidation enregistrée auprès de l’OMPIC.

La répartition sectorielle des entreprises radiées en 2018 montre que les sections les plus touchées sont le « commerce ; réparation d’automobiles et de motocycles », la « construction » et les « activités spécialisées, scientifiques et techniques » avec des parts respectives de 36%, 20,8% et 11,2%, des niveaux quasi-identiques à ceux de 2017 et 2016.

Près de 2/3 des EPMA sont situées sur l’axe Tanger-El Jadida

La répartition géographique des entreprises Personnes Morales Actives (EPMA) montre que celles-ci sont concentrées à hauteur de 66% sur l’axe Tanger-El Jadida. Ainsi, la région de Casablanca-Settat recense 40,3% de l’effectif total, suivie par les régions de Rabat-Salé-Kénitra et de Tanger-Tétouan-Al-Hoceima avec des parts respectives de 14,9% et de 11,2%. Ainsi, près de 2/3 des EPMA sont situées sur l’axe Tanger-El Jadida.

La forme juridique SARL est dominante

La forme juridique principale pour les EPMA est la société à responsabilité limitée (SARL). Sa part dans l’effectif total est de 68%, bien qu’en recul de 2,8 points par rapport à 2017. En revanche, l’effectif des SARL à associé unique (SARL-A.U.), la seconde forme juridique la plus importante, a marqué une hausse de près de 15,5% et prend une part de 24,3% dans le total. La part des sociétés anonymes (SA) a reculé de 3% à 3,6%.

Ratios financiers : Productivité et rentabilité à renforcer

La productivité moyenne par salarié des entreprises étudiée (Chiffre d’affaires moyen généré par salarié) est estimée à 619.225 dirhams en hausse de 3,6% par rapport à 2017. Cette moyenne recouvre des situations très disparates. Ainsi, la productivité des grandes entreprises est plus élevée que celle des microentreprises et des autres catégories de TPME d’environ 5,5 fois et 2,8 fois respectivement. Ces écarts s’expliqueraient par des facteurs organisationnels, technologiques et humains.

En outre, la rentabilité moyenne des entreprises étudiées (résultat net /chiffre d’affaires) s’est établie à 3,5% en 2018 contre 3,7% une année auparavant, proportions recouvrant des situations très hétérogènes. Ainsi, la grande entreprise affiche un taux moyen de rentabilité de 4,8% identique à celui de 2017, alors que celui des TPME (hors microentreprises) a accusé une baisse à 2,4% contre 2,6%. La rentabilité des microentreprises, quant à elles, s’est dégradée à – 7,6% contre – 3%.

Faible niveau d’investissements pour les TPE

L’analyse de la trésorerie nette par catégorie d’entreprises fait ressortir que 85,6% des TPME disposent d’une trésorerie positive. Toutefois, cette proportion reflète des situations disparates. Ainsi, presque 92% des microentreprises, 74% des TPE et 60% des petites entreprises disposent d’une trésorerie positive en 2018. » Loin de constituer des indicateurs positifs, ces ratios confirmeraient la faiblesse du niveau des investissements et le manque de dynamisme de l’activité de ces catégories d’entreprises », est-il expliqué. En revanche, 54,7% des moyennes entreprises ont affiché en 2018 une trésorerie négative, niveau comparable à celui des grandes entreprises (59,4%). Ces indicateurs refléteraient une taille des actifs immobilisés et d’exploitation relativement plus importante, générant des BFR comblés par le recours notamment à l’emprunt bancaire et la dette commerciale.