En attendant le verdict de la commission parlementaire sur la pétition «Parité maintenant», qui a recueilli 13.900  signatures, dépassant largement les 5000 signatures requises par la loi. Dans cette interview, Ouafa Hajji, coordinatrice du Collectif «Parité maintenant » et mandataire de la pétition, considère que la réussite du nouveau modèle de développement, passe par la garantie des places de femmes au sein des instances de prise de décision.

Quelle parité est prioritaire au Maroc ?

La parité dans les domaines politique, institutionnel et économique est prioritaire. La contribution des femmes à la prise de décision consolide la démocratie et accroît  l’efficacité en matière de développement. C’est un projet sociétal. Nous considérons que dès lors que nous aurons une vraie parité entre les hommes et les femmes dans ces domaines, nous aurons franchi un grand pas vers une parité globale et plus inclusive. Si nous souhaitons voir et mettre en œuvre un nouveau modèle de développement, le besoin le plus imminent aujourd’hui serait de pouvoir garantir aux femmes leurs places au sein des instances de prise de décision. Il est évident que le principe de la méritocratie prime également dans cette démarche, il n’est pas question de mettre des femmes uniquement pour répondre aux exigences de la parité d’une manière superficielle.

Pensez-vous qu’il est plus important de privilégier la parité dans les entreprises et surtout des conseils de directions des grandes institutions ?

Le Maroc a besoin de tout son potentiel dont la moitié de sa population que sont les femmes pour construire notre pays.  En partant de cela, la parité homme/femme est primordiale pour garantir un équilibre dans la démarche de prise de décision. Aujourd’hui, toutes les instances de prise de décision quelles qu’elles soient, entreprises ou institutions, sont masculines, vous imaginez bien que les décisions qui y seront prises sont plutôt en faveur des hommes. Nous défendons fortement la participation des femmes dans les sphères de prise de décision, car elle serait un atout majeur, tant en entreprise, car elle apporterait une réelle valeur ajoutée pour la performance de nos entreprises, qu’au sein des institutions notamment en matière de défense et de préservation des droits des femmes.

Vous avez rencontré  des responsables politiques. Qu’est-ce qui ressort de ces échanges ?

Depuis 2017, et tout au long de ce projet pour la parité, nous avons rencontré des leaders politiques qui nous encouragent dans notre démarche et font désormais partie des cent signataires de la charte d’engagement pour la parité. D’ailleurs, comme vous le savez, les organisations de femmes au sein des partis sont très actives,  mais leur rôle reste cantonné à la représentation, aux revendications et à la défense des droits des femmes sans aller au-delà de cette sphère. Nous n’avons pas encore de femmes politiques au sein des comités de gouvernances de ces partis politiques.

L’année 2021 est une année de grands défis au Maroc, notamment au niveau politique, avec les prochaines échéances électorales. Les prémices de la parité pourra se voir à travers 

Où en est la pétition sur la parité que vous venez de lancer ?

La campagne de pétition ‘’Parité Maintenant’’ a débuté en octobre 2020 et a pris fin en décembre 2020. En l’espace de 2 mois et dans des conditions difficiles de crise sanitaire, nous avons réussi à collecter 20.000 signatures, dont 13. 777 qui remplissent les conditions légales prévues par la loi sur les pétitions en plus de 123 signatures sur la plateforme électronique eparticipation.ma. Ainsi, au total 13.900 signatures ont été déposées auprès du président de la Chambre des Représentants le 31 Décembre 2020, dépassant largement les 5000 signatures requises par la loi.

Suite à cela, le collectif «Parité Maintenant » a été invité par le Président de la Chambre des Représentants, le 3 février 2021, à une séance de communication en présence de la commission des pétitions et des motions et les membres du groupe de travail thématique chargé de la parité et de l’égalité. Cette séance a permis aux membres du collectif de mettre l’accent sur les points de douleur des lois actuelles et la nécessité de se mettre au diapason avec la constitution de 2011 qui, dans son article 19, explicite clairement le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes. 

En quoi consiste l’importance de recourir au mécanisme de la pétition?

La pétition est un mécanisme de démocratie participative, elle permet de porter la voix des citoyennes et des citoyens au parlement et pousser le gouvernement à agir à travers des lois. C’est aussi un moyen de sonder l’engagement citoyen et de conférer à une cause toute son importance à travers ce mécanisme officiel. Depuis 2017, nous avons mené des études, organisé des tables rondes et avons recouru au lobbying, nous ne pouvions continuer à défendre la parité sans inclure le grand public, qui est en fin de compte le premiers concerné par ce sujet.

Durant toute l’année 2020, sous Covid-19, nous avons donné l’importance à l’implication de l’opinion publique au projet à travers la pétition nationale pour la parité. La pétition a permis de rassembler autour de l’effectivité de la parité tous les acteurs publics, privés et associatifs ainsi que l’opinion publique, à tous les échelons locaux, régionaux et nationaux, sous le slogan de la campagne nationale «Parité Maintenant ».  A travers une large campagne de communication de pétition, nous avons réussi à impliquer les citoyennes et les citoyens dans la revendication des droits humains des femmes, de se mobiliser pour préserver les droits acquis et veiller à leur effectivité. La pétition est aujourd’hui discutée au sein du parlement, nous attendons donc la réponse de la chambre des représentants.