Les pays de la région MENA, y compris le Maroc, enregistrent des taux de participation des femmes au marché du travail des plus faibles dans le monde (entre 20% et 30% en 2019). Au Maroc, le taux d’activité s’établit en 2019 à 21,5% (contre 71% pour les hommes) et le taux d’emploi à 18,6% (contre 65,5% pour les hommes). Le Maroc accuse non seulement un retard par rapport aux niveaux mondiaux de participation des femmes à la population active, mais il enregistre également une tendance inverse, avec une réduction de 24% des taux d’activité depuis 2000. Cette tendance n’est que partiellement attribuable à la conjoncture économique ou à d’autres facteurs structurels, au regard du fait que sur la même période, les taux d’emploi et d’activité des hommes n’ont reculé que de 4% et de 10% respectivement. C’est l’un des constats majeurs de l’étude intitulée « Coûts économiques des inégalités de genre dans le marché du travail au Maroc », rendue public le 3 mars par la Direction des Etudes et des Prévisions Financières (DEPF) et ONU Femmes. Elle a été réalisée conjointement en partenariat avec le Centre d’Excellence pour la Budgétisation Sensible au Genre (CE-BSG) avec l’appui de l’Agence Française de Développement et de l’Union Européenne. Les résultats phares de ce travail ont été présentés lors d’un webinaire organisé le vendredi 5 mars 2021.

 La baisse générale des taux d’activité provient essentiellement de la catégorie d’âge de 15-24 ans, avec une diminution de 50% pour les femmes contre 38% pour les hommes sur la période 1999-2017.

Dans le même sillage, l’analyse du ratio du taux d’activité des femmes par rapport aux hommes pour les différentes catégories d’âges confirme que l’activité des femmes représente près de 35% celle des hommes en moyenne.

Par milieu, d’importantes disparités entre les milieux urbain et rural en termes d’accès des femmes et des hommes à l’activité sont constatés. Le taux d’activité des femmes reste stable autour de 20% dans le milieu urbain. En raison de l’importance significative du secteur agricole dans l’économie rurale, ce taux oscille entre 30 et 40% dans le milieu rural avec une tendance baissière au cours des dernières années.

Par ailleurs, La décomposition de l’emploi par sexe et par statut professionnel indique que 33% des femmes marocaines actives occupées en 2019 sont des aides familiales et apprenties et 41% d’entre elles sont des salariées et près de 15% occupent le statut d’indépendantes.

Facteurs expliquant la faible participation des femmes au marché du travail au Maroc

Plusieurs obstacles jugés principaux et d’autres complémentaires peuvent être à l’origine de la faible participation des femmes au marché du travail, en l’occurrence, les normes liées au genre, le cadre juridique, la structure de l’économie et du marché du travail, le capital humain… Ces facteurs influencent à la fois l’offre et la demande de travail. Les contraintes familiales, en l’occurrence, le nombre d’enfants à charge constitue un obstacle important orientant la décision des femmes d’intégrer le marché du travail. En outre, la proportion de femmes dans le ménage affecte sensiblement leur accès au travail du fait qu’un poids élevé des femmes dans un ménage leur procure plus de chance pour accéder à l’autonomie économique.

Pour ce qui est de l’effet de l’éducation sur l’accès des femmes à l’activité, les analyses effectuées font état d’effets contrastés en fonction des secteurs d’activité.

Les analyses effectuées dans le cadre de cette étude se sont, en outre, penchées sur l’exercice d’estimation des gaps à rattraper par le Maroc pour se positionner dans une dynamique de développement qui soit inclusive.

Quels sont les gains potentiels en termes de points de croissance économique tirés de l’amélioration de la participation des femmes au marché du travail au Maroc ?

C’est dans ce sens qu’un examen de la relation entre la moyenne mondiale de l’emploi féminin et les trois indices de développement (le PIB par habitant, la fécondité et le niveau d’éducation) et son application pour le cas du Maroc ont été réalisés. Les constats qui en découlent font état d’un taux d’activité des femmes à atteindre par le Maroc qui devrait s’accroitre de 15 à 20 points de plus que le taux enregistré en 2019 soit 21,5%. Ce gap est d’autant plus inquiétant au regard du niveau d’activité féminine qui stagne voire qui régresse sur les deux dernières décennies.

Dans la perspective de quantifier les gains économiques potentiels résultant d’un accroissement de la diversité de genre au niveau du marché du travail au Maroc, plusieurs approches ont été appliquées dans ce sens. Les résultats obtenus font état, entre autres,  de l’existence de complémentarité entre l’emploi masculin et l’emploi féminin dans la fonction de production industrielle nationale (les estimations de l’élasticité de substitution relative au secteur industriel national avoisinent 2), ce qui justifierait l’utilité d’une politique de réduction des écarts d’emploi entre sexes.

Les simulations réalisées, dans ce cadre, en réduisant progressivement l’écart entre l’emploi industriel des femmes par rapport à celui des hommes à l’échelle nationale indiquent des progressions sensibles la production industrielle.

Par ailleurs, des estimations macro-économiques fondées sur un modèle de croissance en « forme réduite » qui couvre un panel de pays, permettant de quantifier l’impact d’une hausse de l’activité des femmes sur le niveau de production, tout en prenant en compte les inégalités de genre en termes d’accès à l’éducation ont été effectuées. Cette approche consiste à estimer le niveau de PIB par habitant en fonction d’un certain nombre de variables explicatives dont notamment, les écarts d’activité entre hommes et femmes, la croissance de la population totale et de la population active, le taux d’ouverture commerciale, le niveau d’investissement public et le niveau d’éducation moyen

Ainsi, une réduction d’un quart de la différence d’activité entre les hommes et les femmes conduirait à une hausse du PIB par tête variant entre 5,7% (en appliquant des mesures liées à la réduction des inégalités de genre dans le marché du travail mais excluant les politiques de promotion de l’égalité de l’accès à l’éducation) et de 9,9% (en adoptant des mesures complètes, incluant la réduction des inégalités de genre d’accès à l’éducation, qui impactent positivement l’activité des femmes).

Une réduction complète de l’écart d’emploi entre les femmes et les hommes, en éliminant les barrières à l’activité des femmes y compris celles liées à l’éducation, induirait une hausse du PIB par habitant de 39,5%.

La progression du PIB par habitant serait de 22,8%, en procédant uniquement à l’élimination des barrières à l’activité des femmes sans prendre en compte celles empêchant un accès équitable et jeunes filles et des femmes à l’éducation.

L’exercice de quantification conduit dans le cadre de cette étude a, ainsi, permis de faire ressortir le supplément de croissance additionnel qui pourrait être généré, à travers le relèvement conséquent du taux d’activité des femmes. A ce gain économique potentiellement mobilisable s’ajoutent les effets induits sur le plan social, voire sociétal, et qui seraient de nature à impulser la dynamique de développement d’ensemble du Maroc.

L’étude ainsi que sa synthèse sont accessibles sur les sites du Ministère de l’Economie, des Finances et de la réforme de l’Administration, de la DEPF et d’ONU Femmes Maroc

PDF (Etude) : http://depf.finances.gov.ma/wp-content/uploads/2021/03/ONU_FEMMES_INTERIEUR.pdf

FlipBook (Etude) : http://depf.finances.gov.ma/etudes-et-publications/#dflip-df_8409/1/

PDF (Synthèse) : http://depf.finances.gov.ma/wp-content/uploads/2021/03/Synthese_ONU_FEMMES.pdf

FlipBook (Synthèse) :http://depf.finances.gov.ma/etudes-et-publications/#dflip-df_8413/1/